Ouffffff… On le voit arriver mais on veut
pas l’voir, on sait qu’on « est dû » mais on ferme les yeux, on veut rien savoir, on remet à demain, on
sait qu’on va en suer un coup et que ça va coûter cher. Le carénage étant une
épreuve, il demande une bonne préparation mentale. Et viens le grand jour où prêt, pas prêt, on doit
prendre son courage à deux main et affronter la bête, le jour ou il faut faire
ce qu’il faut faire : CARRRRÉNER! J’exagère
à peine… Si vous avez bien lu entre les
lignes, vous aurez compris que j’appréhende toujours ce moment exaltant!
Mais qu’est-ce que le carénage? Une révision générale du bateau qui
correspond à une sortie de l’eau du et un court séjour en chantier de 3 jours pour
certains élus (les gagnants à la loterie), mais généralement un plus ou moins
long séjour pour les autres. Et nous, comme beaucoup de navigateurs, on fait partie
des autres, pour le moment du moins. Donc,
on carène pour y refaire l’antifooling (la peinture de la partie de la coque
qui est sous l’eau) afin de ne pas voyager avec d’indésirables passagers tel
que : algues, coquillages, crustacés, etc.
L’antifooling protège la carène, la garde lisse et exempte d’intrus (du
moins les premiers 6 mois) afin de bien glisser dans l’eau lors de la
navigation. Un peu comme le nageur ou le
cycliste qui se rase, comme le skieur qui porte son maillot près du corps tel
une deuxième peau, bref, vous saisissez sûrement, c’est une question de bonne
santé de la coque et « d’aéreaudynamie ».
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On se prépare pour la sortie de l'eau |
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On soulève Toutazimut |
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Le nettoyage à pression de la carène |
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En route vers notre place au chantier |
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C'est partit, on travaille sans relâche |
Je disais donc que l’antifooling prend
environ 3 jours : le premier jour au chantier, on sort de l’eau, on gratte
la carène pour enlever les ‘’intrus’’, on lave à pression et si il reste du
temps, on passe la ponceuse afin de la préparer à recevoir la peinture antifooling. Le 2e jour on termine le ponçage
et donne la première couche de peinture. Le 3e jour on applique la
dernière couche et hop, on retourne à l’eau.
Ça, c’est pour les chanceux si vous vous rappelez, on dirait presque un
séjour en camps de vacance. Pour les
autres, c’est le début d’une multitude de petits ou/et gros travaux à
faire. Et la liste peut être longue…
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Notre appartement |
Notre liste cette année est suffisamment
respectable pour justifier à nouveau la location d’un appartement. On dégote à petit prix un charmant rez-de-chaussée.
Situé à vingt minutes de marche, tout équipé, salon, cuisine et grande galerie
avec vue sur manguier et bananier. N’y manque que l’air climatisé. Mais nous ne
sommes pas seuls : armée de fourmis envahissantes sur le comptoir de
cuisine, petits cadeaux laissés par les souris sur le parquet de la salle à
manger, et escadrille de moustiques piqueurs qui passent à l’attaque pendant
notre sommeil, l’exotisme à son meilleur.
Pas grave; on a un frigo, un poêle à gaz qui fonctionne à moitié, une
douche, deux ventilateurs et surtout l’accès à une laveuse à linge! Ha oui, j’oubliais notre comité d’accueil de
quatre chiens… toujours heureux de nous
voir ceux là!
C’est donc à Sainte-Lucie que nous
entreprenons notre carénage annuel. On a un Toutazimut qui a l’âge de mon fils
Jessie, soit 26 ans. Je vous entends
d’ici : c’est tout jeune et en excellente santé à 26 ans… j’y retournerais
bien moi à cet âge! Juste quelque fois…
je suis d’accord mais pas quand il s’agit d’un bateau, qui de plus a été très
négligé avant qu’on l’adopte… Il a
besoin de beaucoup, beaucoup d’amour et d’entretien. Pensez à une antique petite ville flottante qui gère ses égouts, son aqueduc et
son électricité. Pour une panne
électrique, ce n’est pas la peine de téléphoner Hydro-Québec si vous voyez ce
que je veux dire! Nous sommes totalement
autonomes, et cela évidemment, comporte d’excellents côtés, mais il y a le
revers de la médaille, l’envers de la tapisserie comme on dit. Car c’est aussi en toute autonomie que nous
effectuons la majorité des travaux d’entretien et de réparation, il faut donc
s’improviser électricien, mécanicien, plombier, ébéniste et j’en passe…
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L'accès au moteur demande de la souplesse! |
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Enfin rendu au moteur... |
Grosso modo, voici une liste des travaux importants de cette
année: refaire en partie le puits à chaîne car son plancher est pourri (l’eau
ne s’égoutte pas bien), c’est très
important que le tout soit bien solide car c’est là qu’est logé le guideau (appareil pour lever l’ancre) ainsi que la
chaîne de l’ancre, tout ce qu’il y a de plus léger quoi! - Refaire
le gelcoat le long de la ligne d’eau et réparer les divers dommages, égratignures,
éraflures sur la coque. -Installer une plateforme à l’arrière du
bateau (pour se faire, on doit d’abord changer l’échelle de place). -Changer le passe-coque de la salle de bain
avant. – Refaire la partie du safran qui
est pourrie. Etc.
Pour le puits à chaîne, il a fallu couper et retirer le bois pourri, le remplacer, envelopper
de fibre de verre les nouveaux morceaux
de bois et recouvrir le tout en gelcoat.
Comme il pleut tous les jours, nous avons dû nous improviser une petite
tente en utilisant notre trinquette (voile) pour nous faire un abri et empêcher
l’eau d’y pénétrer. Petite parenthèse:
pas de pluie sous la tente mais aussi, pas d’aération et les vapeurs des
produits chimiques produisent des effets hummm… délirants si on peut dire… Mais
gardons le focus, nous avons maintenant un puits d’ancre qui s’égoutte bien,
qui est solide et qui est tout blanc comme un neuf!
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Guy dans le puit de chaîne |
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Pose du contre-plaqué |
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Pose du fibre de verre sous la "tente" |
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Touche finale: on enduit de gel-coat |
Mon capitaine avec son habilité légendaire
et sa débrouillardise en a impressionné plus d’un quand il s’est mis à travailler
sur le safran… Fallait voir les gars du chantier qui sont venus le féliciter! Opération à cœur ouvert : Guy a dû le
couper en deux, le rebâtir avec plusieurs couches de contreplaqué, sculpter le
bois avec sa ponceuse pour lui redonner son apparence initiale et l’enduire de
plusieurs couches d’époxy pour le protéger et lui donner sa forme finale. Nous avons également enrobé le safran d’un
apprêt protecteur qui, on espère, empêchera l’eau de mer d’y pénétrer à
nouveau. Une vraie beauté dans son genre!
Ne restera que quelques couches d’antifooling à ajouter avant la mise à l’eau.
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Guy et Alain préparent le contre-plaqué pour le safran |
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Collage du contre-plaqué sur le safran |
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Ponçage final, prêt pour recevoir l'antifooling! |
Le passe-coque de la salle de bain nous a
donné du fil à retordre, mais avec l’aide d’un copain, de quelques jurons bien
placés et de beaucoup de patience, les gars on gagné et nous avons de nouveau
un passe-coque bien étanche! Et moi dans
tout ça? Hé bien, en unique
collaboratrice la majorité du temps, je prépare, je mixe, ponce, peinture, je
cours chercher ce qui manque, fais les
courses, la bouffe, la vaisselle, les photos, je mélange les produits
chimiques, bref, telle une infirmière qui aide son chirurgien, j’assiste du
mieux que je peux afin de minimiser notre temps au chantier!
Enfin, il ne reste plus que le ponçage de la
carène avant d’y appliquer notre première couche d’antifooling, signe évident
que la fin des travaux approche! Deux
couches de peinture plus tard et c’est un nouveau Toutazimut en pleine forme
qui est bientôt prêt à retourner à l’eau.
Les échafauds sont en poste pour appliquer la cire et procéder au
polissage afin de protéger le gelcoat, et tant qu’à les avoir (les échafauds),
on décide d’ajouter une jolie touche du genre : petite ligne bleue en haut
de la coque… Il n’y a rien comme les
travaux d’embellissement pour remonter le moral! L’effet est immédiat.
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Peinture antifooling |
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Application de la cire et pose d'une petite ligne bleue sur la coque |
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Ajout d'une plate-forme à l'arrière |
Complètement fourbus mais satisfaits et
fiers de notre travail, on célèbre la fin du carénage par un délicieux repas au
resto de la marina. Les travaux auront pris 18 jours ininterrompus avec lever
du corps à 5h30 et retour vers 18h00. Ce
fut un carénage arrosé ou il a plut tous les jours, et souvent plusieurs fois par jour pour nous
rendre la tâche on ne peut plus compliqué.
Mais il est beau
notre voilier et on a bien hâte de quitter nos ti-zamis de l’appartement pour
nous retrouver à bord. Le reste pourra
toujours se faire tranquillement à l’ancre entre ciel et mer! Pas si pire le travail quand on a un atelier
avec vue sur la mer! De plus, faut voir
les bons côtés, nous sommes passé d’un carénage de 5 semaines en 2010, à un
carénage de 18 jours en 2011. Deux fois
moins long, un avenir prometteur!
Objectif 2012 : On divise encore par deux; ce qui devrait
nous donner 9 jours! À suivre…
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